Deborah: blogueuse Hello Family

Quand les enfants boudent leur assiette

Aversion pour les légumes verts, tri zélé des aliments, dégoût des aliments inconnus... Quand un refus de manger est-il normal? Quand faut-il demander conseil au pédiatre? Notre blogueuse Hello Family Deborah répond à ces questions.

Connaissez-vous Gaspard-mange-ta-soupe? Ce personnage fait partie du recueil d'histoires pour enfants Der Struwwelpeter (Crasse-Tignasse) publié en 1844 par l'auteur allemand Heinrich Hoffmann. La particularité de Gaspard, c'est qu'il refuse obstinément de manger sa soupe – jusqu'à en mourir. Cette histoire, pour cruelle qu'elle soit, montre bien que les enfants difficiles ont toujours existé – quoi qu'en disent les grands-parents. Évidemment, il ne viendrait plus à l'idée des parents d'agiter la menace de la mort pour inciter leurs enfants à mieux manger. Néanmoins, les refus alimentaires des petits demeurent un casse-tête pour les parents.

Il y a une chose que de nombreux parents ignorent: jusqu'à un certain âge, il est tout à fait normal que les enfants soient difficiles à table. À vrai dire, c'est même une question de survie. Ce phénomène est appelé néophobie, ou refus des aliments nouveaux, et il concerne 50 à 70 % des enfants. Jusqu'à l'âge de deux ans environ, les petits goûtent et mangent avec enthousiasme tout ce qu'on leur propose. Entre deux et sept ans, beaucoup d'enfants commencent à trier certains aliments et à refuser de les manger. Pendant cette période, les pâtes au fromage deviennent leur plat préféré. La néophobie n'est pas un simple caprice de la nature, mais au contraire un mécanisme de survie essentiel. Si les enfants de l'âge de pierre avaient mangé tout ce qu'ils trouvaient sur leur chemin, l'humanité n'aurait probablement pas survécu. La néophobie est un mécanisme de protection inné contre les plantes toxiques.

En général, elle s'atténue autour du septième anniversaire de l'enfant. À cet âge, nos petits ancêtres avaient eu le temps de différencier les plantes comestibles des autres. C'est donc autour de sept ans que les enfants d'aujourd'hui retrouvent le goût des aliments inconnus. Leur curiosité s'accentue, ils goûtent avec plaisir de nouveaux plats et découvrent des saveurs inédites. À côté de la néophobie, un autre phénomène peut expliquer les refus alimentaires des enfants: ils perçoivent les saveurs et les odeurs bien plus intensément que les adultes. Les enfants ont environ 10 000 papilles gustatives sur la langue. Les adultes, eux, n'en possèdent que 3000 à 5000. Alors, quand un enfant fait la grimace à cause d'un grain de poivre ou d'un concombre au vinaigre, il ne fait pas la comédie pour énerver ses parents. Il exprime simplement le fait que son palais est beaucoup plus sensible que le nôtre.

Malgré tout, même si les enfants ont d'excellentes raisons de chipoter à table, elles ne sont pas d'une grande aide pour les parents. Je parle en connaissance de cause. Moi aussi, j'ai déjà passé de longues heures en cuisine pour mitonner un repas savoureux et équilibré à mes enfants... Et je les ai vus faire la grimace rien qu'en flairant l'odeur du souper. Dans ce genre de situations, je pense qu'il faut trouver des compromis. Chez nous par exemple, on ne critique pas la nourriture, et on ne la qualifie pas de  «dégoûtante». Les plats proposés doivent être goûtés – ou au moins regardés. Mais personne n'est forcé de manger. Ceux qui n'aiment pas le menu peuvent manger une tartine beurrée à la place. Les enfants doivent accepter que leur plat préféré ne figure pas tous les jours au menu. Et il est hors de question de préparer plusieurs plats par repas.

Contrairement à ce qu'on pourrait penser, les mangeurs difficiles ne sont que très rarement carencés. Néanmoins, si le comportement alimentaire de votre enfant vous inquiète, s'il est souvent fatigué ou qu'il ne grossit pas suffisamment, demandez conseil à votre pédiatre. Il ou elle vérifiera si votre enfant présente des carences au moyen d'une prise de sang. Parfois, les refus alimentaires ont une cause bien précise, par exemple une intolérance ou une hypersensibilité. En dernier recours, les parents peuvent aussi dissimuler des légumes dans les plats préférés des enfants. À l'aide d'une râpe ou d'un mixeur, il est relativement facile de faire passer incognito des aubergines dans la sauce tomate et des betteraves dans les pancakes.

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